Les troubles musculosquelettiques : ennemi numéro un au travail

Temps de lecture : 14 minutes
08/03/2024

Tu crois connaître ton pire ennemi au boulot ?

Tu penses à qui ?

Ton manager incompétent, ton tyran de chef ou ton collègue insupportable ? OK, je vois.

T’as tout faux ! Ton pire ennemi, ce sont les TMS...

Oui, les fameux troubles musculosquelettiques. Tu doutes ?

Pourtant, ils sont responsables de 88 % des maladies professionnelles en France. Autant te dire que s’y intéresser est plus qu’urgent.

Pas de panique, on te fait le point ici. Tu sauras tout !

Et n’hésite pas à en parler autour de toi (par exemple à ton boss)...

Source : https://www.santepubliquefrance.fr/les-actualites/2022/troubles-musculo-squelettiques-dans-le-secteur-de-la-sante-humaine-et-de-l-action-sociale-mieux-connaitre-les-facteurs-de-risque-pour-mieux-les-p

Les TMS, les comprendre pour mieux les combattre

Aïe ! Ça commence comme ça...

On se réveille un matin, et l’on a mal. Et puis un peu plus tous les jours.

On se dit que c’est l’âge et l’on passe au-dessus.

Et pourtant... Saurez-vous répondre non à ces questions :

·      Avez-vous parfois une gêne, une douleur, ou des fourmillements aux articulations ?

·      Faites-vous des gestes ou des tâches répétitives au travail ?

·      Au boulot, vous arrive-t-il de faire de gros efforts physiques ou d’avoir une posture peu confortable ou trop statique ?

Vous avez répondu oui à une question ?

Alors, il est probable que vous ayez des TMS.

Et vous n’êtes pas le seul !

Selon une étude réalisée par l’IFOP pour PERCKO (2023) :

·      86% de salariés français ont déjà souffert de TMS.

·      77% estiment leur travail responsable de leurs TMS (93% pour les télétravailleurs).

Et il en existe un large catalogue : tendinites, lombalgies, cervicalgies, épicondylite latérale au coude, hygroma du genou, syndrome du canal carpien au poignet, syndrome de la coiffe des rotateurs à l’épaule ? etc.

Les troubles musculosquelettiques (TMS) : Kezako ?

Définition :

Les TMS sont des pathologies douloureuses touchant les tissus mous (articulations, muscles, tendons, nerfs). Ils peuvent engendrer de nombreux troubles : douleurs articulaires et musculaires, maladies aiguës et/ou chroniques, inflammations, lombalgies, stress et fatigue constante…

Les TMS sont les conséquences d’un déséquilibre entre les capacités du corps et les sollicitations physiques du travail. Mouvements répétitifs, mauvaises postures ou charge de travail trop lourde peuvent en être à l’origine.

Ces TMS surviennent progressivement entraînant des douleurs au travail et occasionnant de nombreux arrêts de travail.

3 chiffres parlants pour la France :

·      Près de 30% des arrêts de travail sont causés par un TMS.

·      87/88 % des maladies reconnues dans le monde du travail pour 2019-2020. Les TMS sont la première cause de maladies professionnelles indemnisées.

·      45% des TMS entraînent un risque d'inaptitude au travail.

Quels symptômes ?

Cela dépend de la zone touchée.

Mais le plus souvent, on peut ressentir et observer une douleur, de la raideur dans les membres, des gonflements (type œdème), des engourdissements et des fourmillements...

Attention, si ces symptômes sont plus importants lors d’un effort, ils apparaissent aussi au repos.

Quels secteurs d’activités ?

Généralement, les TMS touchent davantage les milieux professionnels demandant des efforts physiques constants, avec des charges lourdes, des gestes répétitifs et des piétinements.

Mais en réalité, tous les secteurs sont concernés, y compris dans le tertiaire : on constate que le travail assis et sédentaire provoque de nombreux TMS.  

Les secteurs généralement les plus touchés :

Source :  https://www.cramif.fr/actualites/le-programme-tms-pros-une-demarche-de-prevention-en-4-etapes

Ici, les efforts physiques sont réguliers et importants entraînant de nombreuses pressions sur les muscles et les articulations.

Ces TMS qui vous coûtent cher

Quels sont les différents types de TMS ?

Selon l'Assurance Maladie (2020), voici les TMS les plus fréquents :

1)    Le poignet (syndrome du canal carpien ou de Guyon) pour 38 %. Il s’agit d’une compression des nerfs.

2)    L’épaule (tendinopathie de la coiffe des rotateurs) pour 30 %.

3)    Le coude (épicondylite latérale et épitrochléite) pour 22 % des cas.

4)    Le bas du dos (lombalgies) pour 7%.

5)    Le genou (Bursite ou hygroma) pour 2%

Plus rare :

·      Les cervicalgies pour les douleurs au niveau du cou.

·      Les tendinites au niveau de la main.  

·      Tendinite de la cheville

À noter : l’étude IFOP/PERCKO (2023) donne une hiérarchie différente, mais confirme l’importance des TMS chez les salariés français.

1)    Le dos (69%)

2)    Épaules et nuque (58%)

3)    Genou (38%)

4)    Poignet (30%)

5)    Coude (15%)

De la baisse de productivité à l’arrêt de travail voire à l’incapacité de travailler, les impacts des TMS sont nombreux. Salariés, entreprises et gouvernement doivent les prendre très au sérieux.

© Assurance Maladie - Risques professionnels

Conséquences ? L'impact des TMS

Les impacts sont multiples :

·      Pour le salarié en premier lieu : douleur, fatigue physique et psychologique. Dans ces conditions, travailler devient de plus en plus difficile, voire insupportable. Les TMS peuvent entraîner des arrêts de travail ou une inaptitude définitive au travail (près de 50% des TMS entraînent des séquelles lourdes). La douleur peut aussi provoquer des inattentions et une baisse d’efficacité entraînant des accidents de travail (20% en moyenne).

·      Pour l'entreprise : Les chiffres de l’assurance maladie parlent de 2 mois d’arrêt de travail et 22 millions de journées de travail perdues (1 arrêt maladie sur 3 est dû aux TMS). Cela représente des coûts directs et indirects pour l’entreprise. Avec un coût direct pour les entreprises approchant les 2 milliards d'euros (cotisations Accidents du Travail/Maladie Professionnelle 2017).

On obtient alors l’évolution suivante :

Source : assurance maladie et https://www.azergo.ch/guides-conseils/les-conseils-ergo/ergonomie-prevention-tms-enjeux-entreprises/


En effet, l’absence des salariés ou leur difficulté à travailler engendrent une baisse de performance et donc de productivité.  Soit le travail est moins efficace, soit il faut remplacer la personne absente. Dans certains cas, c’est une augmentation du Turn-over et la nécessité de reformer un nouveau salarié...

On voit ainsi se cumuler, perte de temps, d’efficacité, de productivité et d’argent. Les équipes sont perturbées et l’image de marque de l’entreprise est assombrie. Dans ces conditions, la difficulté de garder ses talents ou d’en recruter d’autres peut parfois devenir de plus en plus difficile.

Pour rappel :

Source : https://nawo-solution.com/les-troubles-musculosquelettiques-tms/

La prévention apparaît donc comme nécessaire pour éviter ces conséquences négatives pour les salariés et l’entreprise. Pour cela, il faut découvrir la source de ces maux.

Quelles sont les causes des TMS ?

Pour lutter efficacement contre les TMS, il convient tout d'abord de comprendre leurs origines, leurs facteurs.

Les TMS sont d’origine multifactorielle : ils résultent d'une combinaison de différents facteurs de risque(cependant, le facteur professionnel est la première cause connue provoquant l’apparition des TMS).

Exemples classiques et connus :

·      Mouvements répétitifs : effectuer les mêmes gestes toute la journée (utiliser une souris ou un clavier d'ordinateur, ou monter/démonter des pièces).

·      Mauvaises postures : Avoir et garder longtemps une position inconfortable ou statique.

·      Charge de travail importante : lever, soulever ou déplacer des charges trop lourdes et trop souvent.

·      Environnement de travail inadapté : avoir un poste de travail inadéquat, des outils inadaptés ou non ergonomiques.

Mais pour réellement maîtriser le sujet, il faut s’intéresser aux études plus approfondies.

TMS : Quels facteurs ?

Rapidement, on peut convenir qu’il existe 2 types de facteurs :

·      Les facteurs intrinsèques ou individuels :  liés à l’individu lui-même (sa santé physique et mentale, son âge, etc.).

·      Les facteurs extrinsèques : extérieurs à l’individu (biomécaniques, environnementaux, psychosociaux et organisationnels). Ce sont ces facteurs que l’on retrouve dans le milieu professionnel et qui sont considérés comme déterminants.

Mais, les spécialistes vont plus loin et proposent 5 grandes catégories de facteurs :

Source : https://www.laminutepeps.com/prevention-tms/

1.     Les facteurs biomécaniques

Ce sont les détails d’une tâche allant à l’encontre de la biomécanique de notre corps, en inadéquation avec nos capacités physiques.

On retrouve dans cette catégorie :

·      La répétition des mouvements.

·      Les positions inconfortables.

·      Les efforts physiques intenses.

·      Le travail statique sur une longue durée.

Ici, le salarié dépasse ses capacités physiques sans lui donner le temps de récupérer, entraînant l’apparition des douleurs.

2.     Les facteurs environnementaux

Ici, ces facteurs concernent votre poste de travail (Outils, locaux, espace pour travailler, etc.).

Exemples :

·      Bruit.

·      Éclairage.

·      Température.

·      Ergonomie du matériel.

En fonction de leurs présence, absence ou excès, ces éléments peuvent soit aggraver soit soulager les contraintes biomécaniques.

3.     Les facteurs psychosociaux

On n’y pense pas assez, mais le stress et la charge mentale peuvent influer sur les TMS.

Il suffit d’une mauvaise estime de soi, d’un management agressif et survient alors un déséquilibre émotionnel suscitant ou aggravant les TMS.

Exemples :

·      Le manque de reconnaissance de sa hiérarchie.

·      La pression psychologique (stress de l’ampleur d’une tâche ou des délais).

·      Des relations sociales dégradées, une absence de solidarité entre collègues.

·      L’insécurité de l’emploi ou un mode de rémunération fragile.

Le salarié, proche ou vivant un Burn-out ou un Brown-out, va souvent déclarer des TMS en signes avant-coureurs...

4.     Les facteurs organisationnels

Ici, on touche à l’organisation du travail et de la production.

Selon la cadence de son travail et des horaires, un salarié peut ressentir plus ou moins de fatigue. Les conséquences sur les TMS sont importantes : un salarié qui a le temps de récupérer déclare moins de TMS.

Exemples :

·      Rythme de travail.

·      Temps de travail, horaires, durée, horaires décalés.

·      Temps de récupération.

·      Délais de réalisation.

·      Pauses insuffisantes.

·      Tâches standardisées, travail rythmé sur machine.

·      Manque d’alternance des tâches.

5.     Les facteurs individuels

On retrouve ici nos facteurs intrinsèques propres à chaque individu.

Certains antécédents médicaux sont à prendre en considération lorsqu’on évoque les TMS.

D’autres éléments comme la surcharge pondérale, la fatigue ou un état de fragilité psychologique peuvent contribuer à l’apparition des TMS.

Critères à surveiller :

·      L’âge.

·      Le sexe (les TMS touchent davantage les femmes).

·      L’état de santé : arthrose, rhumatismes, traumatismes articulaires, surpoids, diabète, problèmes de thyroïde, maladies immunitaires, etc.

·      La santé mentale : troubles anxieux, stress, dépression, troubles du déficit de l’attention, etc.

·       La sédentarité.

·      L’ancienneté au poste.

À partir de la compréhension de ces facteurs, on peut alors élaborer une politique de prévention afin d’éviter ou de soulager les TMS.

Comment prévenir les TMS ?

C’est, autant que faire se peut, limiter les facteurs de risque. Dans ce cadre, et pour le bien de tous,employés et employeurs doivent alors agir ensemble.

1)    Obligations légales : que dit le Code du travail ?

Dans ce cadre, il faut rappeler l’obligation de l’employeur d’« assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale » de ses salariés :

·      Les articles L 4121-1 à -5 du Code du travail.

·      Les articles R. 4541-1 et suivants

Outil à ne pas négliger : le document unique d’évaluation des risques professionnels (à faire une fois par an)

·      L’ article 4121-3 du Code du travail

À noter : l’employeur a une obligation de mise en place de moyens, mais pas de résultats.

L’employeur est donc, par exemple, tenu d’évaluer, d’informer et de mettre en place des actions de prévention contre tous risques professionnels.

Il existe aussi des normes qu’une entreprise se doit de respecter.

Exemples :

·      La norme NF EN ISO 14738 (X 35-104, 2008) concerne les équipements de travail. Elle donne des recommandations anthropométriques sur la conception des postes de travail, sur les machines et le dimensionnement des postes.

·      La norme NF EN 12464-1 (X 90-003-1, 2011) concerne l'éclairage des lieux de travail.

2)    Une politique de prévention des TMS repose sur 3 piliers :

Source : https://www.inrs.fr/risques/tms-troubles-musculosquelettiques/prevention.html

·      Une évaluation et un dépistage des risques par une analyse des situations de travail.

·      La mise en place d’un plan d’action pour maîtriser les risques.

·      Un bilan régulier pour ajuster et adapter les actions.

(On pourra se référer aux principes généraux de prévention des risques de l’article L.4121-2.)

En préambule, il faut s’assurer de la participation de tous les acteurs de l’entreprise dans l’optique d’obtenir le plus d’informations possible (salariés, managers, employeurs, instances syndicales, CSE, etc.). Il faut ainsi tous les mobiliser en les informant de la mise en place d’une réelle politique de prévention efficace. On peut imaginer aussi l’intervention de professionnels de la santé (ergonomes, kinésithérapeutes ou ostéopathes).

1re étape : évaluer les risques

En s’appuyant sur les facteurs que l’on a précédemment cités, il s’agit d’interroger le fonctionnement de l’entreprise.

Objectif : repérer et analyser les différentes situations de travail à risque afin d’en comprendre les causes.

Il faut ainsi effectuer des analyses précises sur les postes de travail et les gestuelles des salariés. Avec ces recherches, on constatera ainsi les situations favorisant les risques de TMS (organisation de l’espace de travail, qualité des machines, des outils et du matériel, du mobilier et des conditions environnementales, etc.).

Pour cela, il faut interroger chaque salarié avec, si possible, l’assistance du médecin du travail. Certains questionnaires spécialisés existent ( exemples : le  nordique ou le protocole  SALTSA ).

Lors de ces entretiens, le salarié doit pouvoir décrire son travail, son espace de travail et ses outils avec précision. Puis, la façon dont il ressent et vit sa journée de travail.

Différentes sources d’informations peuvent être consultées et mobilisées :

·      Consultation des salariés.

·      Consultation des données de l’entreprise.

·      Consultation du comité social et économique (CSE).

·      Consultation des informations liées au Turn-over, à l’absentéisme, aux caractéristiques sociales et physiques des salariés selon leur poste, etc.

·      Consultation de la médecine du travail.

·      Le document unique d’évaluation des risques professionnels

2e étape : Maîtriser les risques

Une fois repérées les situations problématiques, une nouvelle étape s’enclenche : celle de la transformation. L’entreprise élabore alors un véritable plan pour éradiquer ou réduire les difficultés constatées.

Des solutions immédiates peuvent alors être mises en place :

Des solutions techniques

·      L’adaptation du matériel et du poste de travail pour en améliorer l’ergonomie (achat de matériel, comme des chaises ergonomiques, réaménagement de l’espace, etc.).

·      Investissement sur les machines-outils (choisir de courber l’outil plutôt que le poignet, avoir les machines les moins vibrantes possibles)

Des solutions organisationnelles

·      L’ajustement des méthodes de travail (rythme, horaires, variabilité, alternance des tâches, accorder plus de pauses, etc.).

·      Une sensibilisation aux TMS pour vos équipes, en groupe (Ateliers QVCT, journées de formations sur les postures, l’hygiène de vie, etc.).

·      Des entretiens individuels afin de leur apprendre les bons gestes personnalisés.

3e étape : faire un bilan régulier

Toute démarche de prévention doit inclure une phase finale d’évaluation. Il faut régulièrement demander un bilan concernant les actions mises en place.

Pour cela, l’observation de certains indicateurs s’impose :

·      Le nombre d’accidents du travail, d’arrêt maladie ou de maladies professionnelles, de plaintes ou de passages à l’infirmerie.

·      Le taux du Turn-over et d’absentéisme.

·      Le nombre de reconversions.

Il faudra alors vérifier si les TMS sont reliés à ces chiffres et, si c’est le cas, reprendre les étapes pour améliorer et ajuster les mesures précédentes insuffisamment efficaces.

Tu connais désormais bien les TMS ! Leurs symptômes, leurs causes et leurs facteurs.

Tu as désormais toutes les informations pour discuter de mesures de prévention dans ton entreprise. Et je te souhaite de contribuer avec énergie à ce travail nécessaire.

Dans l’article suivant, on te propose d’aller un peu plus loin.

On a parlé de prévention, mais il ne faut pas s’arrêter là. Il faut aussi parler de soulagement.

Or, le sport et les activités physiques, lorsqu’ils sont bien utilisés, peuvent largement apporter une solution bien-être.

Alors, prépare-toi à apprendre quelques exercices utiles pour combattre les TMS.

À tout de suite.

Par Edmond Kean.

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